A batons rompus

Wednesday, November 10, 2010

Le Pr Chater Khelifa invité de l’INESG : En l’absence d’un leadership, une gestion collective des problèmes et conflits

Wednesday, November 05, 2008

Une nouvelle ère américaine !

L'inattendu, l'improbable s'est produit...Avec l'élection de Barak Obama, l'Amérique a marqué sa volonté d'ouvrir une nouvelle ère :

1-Les huit ans de la présidence de Bush relèvent désormais de l'histoire. Elle gardera, en mémoire, les effets de l'unilatérisme, de la guerre préventive, fut-elle non justifiée ! L'élection d'Obama permettra de réconcilier l'Amérique avec le monde. Je dirais plutôt qu'elle réconcilie l'Amérique avec elle-même, avec son opinion publique, avec ses principes fondateurs.

2- L'élection d'un afro-américain consacre, la vision "arc en ciel", une reformulation plus appropriée que le melting-pot, pour exprimer cette volonté de participation communautaire effective. De ce pont de vue, le discours s'est inscrit dans la réalité. Il aura son impact et ses effets d'entraînement en Amérique et ailleurs. Dans l’Amérique désormais post-raciale, il incarne le nouveau rêve américain.

3 - Elu dans une difficile conjoncture, le Président Obama doit faire face :
- à la crise financière et son impact social,
- à la remise en question de la politique extérieure des USA et de ses engagements militaires,
- à l'amélioration de l'image des Etats-Unis, en relation avec son statut d'hyperpuissance.

Consacrant l'échec de la droite conservatrice, la victoire d’Obama est en mesure d'assurer la promotion des Etats-Unis. Mais est-ce que cette volonté de changement sera en mesure de réussir sa mise à l'épreuve face à la pesanteur de la politique, de la réalité des intérêts internationaux, des alliances traditionnelles et des préférences géopolitiques ?
Désormais tout le monde regarde la nouvelle Amérique. Tout le monde s'érige en témoin de ce nouvel espoir. Sera-t-elle en mesure de faire face à ce grand défi ?


Professeur Khalifa Chater

Monday, September 15, 2008

Le retour de la France au Moyen-Orient ?

Dans quelle mesure est-ce que le voyage du Président Nicolas Sarkozy en Syrie (3-4 septembre) constitue un événement historique, susceptible de changer la donne géopolitique au Moyen-Orient ? L’ère post-guerre froide, qui a institué l’ordre monopolaire, a assuré une prédominance américaine dans cette aire et limité la marge de manoeuvre des puissances européennes, sur cette scène. La prise de distance du Président Chirac de la politique engagée par l’Establishment américain, en Irak, a permis à la France d’affirmer son autonomie de décision et de gagner l’opinion publique arabe, traumatisée par l’intervention militaire et la « pacification », qui s’en suivit. Cette politique, qui aurait vraisemblablement, des effets bénéfiques dans le long terme, l’a cependant exclu naturellement, lors des partages des bénéfices de l’opération (pétrole, marchés de reconstruction, alliance avec le nouveau pouvoir de Bagdad). Le rapprochement franco-américain lors du traitement de la question libanaise et la révision de la politique américaine de la France, par le Président Sarkozy, - nous n’irons pas jusqu’à parler de son atlantisme - n’ont pas changé profondément la donne, en dépit d’une coordination évidente de la politique des deux acteurs occidentaux en Afghanistan. Les faits géopolitiques sont têtus. Ils consolident, pour longtemps, les bénéfices du leadership.
Le Président Nicolas utilise les opportunités de la nouvelle conjoncture à savoir l’éclipse électorale américaine, fut-il ponctuelle, l’exercice par la France de la présidence de l’Union Européenne et les velléités de changement de la politique syrienne, qui a révisé sa politique au Liban et engagé des négociations indirectes avec Israël. L’impasse de la question du nucléaire iranien - puisque l’Europe s’oppose à Téhéran mais ne peut se résoudre à soutenir une riposte militaire américaine ou israélienne contre lui - incite le Président français à solliciter une entremise syrienne, pour inciter l’Iran à répondre avec bienveillance aux propositions européennes. La «normalisation » de ses relations avec la Syrie permettrait à la France d’assurer sa présence sur la diplomatique proche orientale, dominée par les Etats-Unis. D’ailleurs, le président français a affirmé, le 4 septembre, que la Syrie «avait un rôle à jouer» dans la résolution de tous les conflits de la région qui « sont liés ». Et ne perdons pas de vue les objectifs industriels et commerciaux de la politique française.
De ces points de vue, le voyage du Président Sarkozy fut couronné de succès. Il lui a permis d’assurer une plus grande présence française sur les marchés syriens, de confirmer le rapprochement libano-syrien, de tenter une opportunité de dialogue avec Iran et de proposer le parrainage de la France, aux négociations indirectes israélo-syriennes. Cette percée française sur la scène moyen-orientale doit néanmoins s’accommoder des rapports de forces dans la région et de la nécessaire participation des USA au processus de paix, que le Président syrien, par réalisme politique, rappela publiquement, au cours de la conférence de presse, mercredi. D’autre part, les pourparlers Assad/Sarkozy n’avaient pas l’ambition de décrocher la Syrie de l’axe Téhéran-Damas. Alors que Sarkozy demandait au Président Assad de transmettre son message au pouvoir iranien, Assad lui rappela la politique traditionnelle syrienne, en faveur de la dénucléarisation du Moyen-Orient et défendit l’argumentaire iranien, en faveur de l’utilisation du nucléaire civil, expliquant la crise par un simple manque de confiance entre les acteurs. L’entretien Sarkozy/Assad permit de dissiper les malentendus, de rapprocher les points de vues, par une transgression bien opportune de la politique d’exclusion et de culpabilisation. La France a eu le mérite de considérer l’unique Etat laïc du Moyen-Orient arabe comme un partenaire pour la stabilité de l’aire, à la merci des dérives intégristes.
L’organisation, jeudi 4 septembre, d’un sommet quadripartite -baptisé « Dialogue pour la stabilité » - et réunissant, outre la France, Présidente de l’Union Européenne, la Syrie, Présidente de ligue des Etats Arabes, le Qatar, Président du Conseil du Golfe et la Turquie, organisatrice des négociations indirectes entre la Syrie et Israël, devait engager des concertations entre ces importants acteurs sur les questions de la stabilité, de la paix et de la sécurité dans l’aire. Pouvait-on évoquer la mise sur pied d’un axe alternatif, susceptible d’assurer une nouvelle direction diplomatique de la scène moyen-orientale ? Sans doute devrait-on prendre la mesure de l’occultation du leadership de l’Egypte et de l’Arabie Séoudite ? Fait évident, ce sommet consacre de nouveaux acteurs, en relation avec les nouvelles priorités (négociations indirectes, question iranienne etc.) et les interventions de nouveaux acteurs et/ou protagonistes sur la scène. Nous avons évoqué le message français à l’Iran, par l’entremise de la Syrie. D’autre part, l’Emir du Qatar a affirmé, lors de ces assises, qu’il «ne faut pas introduire les pays du Golfe dans une guerre contre l’Iran ». De son côté, le Président Bachar al-Assad a affirmé que la situation dans le Caucase, suscite son inquiétude. Il ne veut pas, dit-il, d’une nouvelle guerre froide dont le Proche-Orient ferait les frais, puisqu’il deviendrait son aire de confrontation.
A cet effet, il a affirmé que ce sommet, n’a pas pour objectif de créer de nouvelles zones d’influences, qu’il avait comme ultime objectif de servir la paix et la stabilité et qu’il a évoqué le rôle des USA, après les prochaines élections. Même politique de prudence du Président Sarkozy, qui rappela le rôle de l’Egypte et de l’Arabie, absentes de cette instance. Le Sommet quadripartite privilégia néanmoins de nouveaux acteurs et met à l’ordre du jour de nouvelles approches diplomatiques. Est-ce à dire que nous sommes en présence d’un nouveau tournant au Moyen-Orient ? Disons plutôt que ces entretiens expriment des velléités, traduisent de nouvelles attentes internationales, européennes et arabes. Mais peuvent-ils réellement mettre à l’épreuve les données effectives sur le terrain.
Chasses croisées, des voyages du Président Sarkozy dans le Machrek (l’Orient) et de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, au Maghreb. Après une visite historique en Libye, vendredi 5 septembre, où elle a rencontré vendredi le leader libyen Mouammar Kadhafi et ouvert un nouveau chapitre entre les deux anciens ennemis, Condoleezza Rice a poursuivi sa mission en Tunisie, Algérie et au Maroc.

Professeur Khalifa Chater

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Thursday, August 21, 2008

Le retour de la guerre froide ?


«La fin de la menace massive ne signifie pas la paix. Si l’illusion était tentante, la prolifération des crises et conflits hors d’Europe (Irak) ou en Europe même (dans l’ancienne Yougoslavie qui éclate avec l’URSS, dans le Caucase, aux confins asiatiques de l’ancien empire) devrait vite la dissoudre... » (Dominique David Sécurité : l’après-New-York Presse des Sciences Po. Paris 2002 p. 17).

Le déclanchement de la guerre de Géorgie engage un re-examen de la géopolitique internationale, une re-évaluation des mutations du jeu des acteurs sur la scène-monde, une redéfinition de notre conjoncture d’histoire immédiate appelée hâtivement post-guerre froide. Dans son analyse pertinente, Dominique David, estime que la fin de la guerre froide, constitue « une révolution » tout en étant « une non-guerre» et il fait valoir que le « différentiel de puissance » dont s’assure désormais les Etats-Unis met fin à «l’antagonisme des blocs militaires» (Dominique David Sécurité : l’après-New-York op.cit. pp. 12-15). Bien entendu, les considérations stratégiques étaient confortées par la « guerre idéologique », entre le capitalisme et le communisme, permettant aux deux protagonistes de légitimer leur différend et de définir leurs aires d’alliances.
Dans ce contexte de l’après-guerre froide, du désaveu du communisme en Europe centrale et orientale et de l’homogénéisation idéologique qu’il engagea, la Russie se résigna à voir ses anciens alliés quitter le bateau. Plusieurs d’entre eux rejoignirent l’Union Européenne et/ou de l’Otan. L’Ukraine et la Géorgie engagèrent le processus de leur intégration dans le club atlantiste. Assumant leur alignement, la Pologne et de la République Tchèque permirent aux Etats-Unis d’envisager de déployer sur leur sol, leur bouclier anti-missile, soi-disant, pour protéger leur territoire contre d'éventuelles attaques de pays comme l'Iran. Situation asymétrique, caractérisée par l’éloignement de la menace des Etats-Unis et de la défense territoriale qu’elle implique, alors que la Russie a comme voisins des alliés du clan adverse. Sur les autres scènes (Irak, Palestine Afghanistan Iran etc.) la Russie dut prendre acte de son statut d’acteur de deuxième niveau, sinon de comparse, dans l’ère monopolaire. En dépit de l’entrée sur la scène internationale, d’autres acteurs, particulièrement l’Union Européenne et la Chine, le jeu géopolitique reste dominé, dans une certaine mesure, par « les adversaires-partenaires» (expression de Raymond Aron) de la guerre froide. Mais les Etats-unis ont profité de la redimension effective de leur challenger de la guerre froide et de la rupture de l’équilibre bipolaire qui s’en suivit, pour étendre, comme on l’a vu, leurs moyens et leurs champs d’action.
Dans cette analyse de l’enchaînement des faits depuis la chute du mur de Berlin, il apparaissait que Moscou a «peu de chance de reconstruire, à moyen terme, une vraie puissance extérieure avec une capacité de projection militaire massive » (Ibid, p. 16). Or, la guerre de Géorgie semble annoncer un tournant, vu le processus de redynamisation militaire (intervention en Géorgie) et diplomatique (position différentielle sur la question du nucléaire iranien), mis en oeuvre par l’Establishment russe. Le duel américano-russe pourrait s’engager, par acteurs interposés, dans le nouveau contexte. Nous retrouvons les termes de référence identifiés par l’analyse de Dominique David : «Au temps de l’affrontement EST-OUEST, dit-il, la garde du sanctuaire était première, centrale, l’action extérieure marginale ». Or, désormais « l’essentiel de la problématique est tourné vers l’organisation de l’intervention de stabilisation extérieure (op. cit. p. 19).
Dans la crise actuelle, le rôle de l’Union Européenne et du Président Sarkozy, a permis d’élaborer, dans l’urgence, un accord de cessez le feu. Les observateurs ont souligné l’attentisme américain, tempéré par un engagement diplomatique, la pause de réflexion atlantiste et l’absence du consensus nécessaire au sein du Conseil de Sécurité. Le compromis conjoncturel du cessez le feu, a eu certes, le mérite d’arrêter les affrontements meurtriers ; mais il laisse plusieurs questions en suspens, difficiles à régler par les instances internationales. Peut-on exclure, comme geste de sagesse, un accord bilatéral lorsque les relations seront apaisées ?
Notons, dans le cadre des repositionnements signalées, dans l’aire de voisinage de la Russie, son ancien glacis protecteur, la signature le 20 août à Varsovie, par la Pologne et les Etats-Unis d’un accord de coopération militaire qui prévoit l'implantation d'ici 2012 de dix intercepteurs capables de détruire en vol d'éventuels missiles balistiques à longue portée. L’empressement des signataires s’explique par l’escalade de la guerre de Géorgie. La présence à sa frontière de ce bouclier antimissile et le déploiement, en Pologne, des batteries anti-aériennes de dernière génération ne sont pas de nature à dissiper les craintes de la Russie. Des interventions militaires préventives, contre la Russie ou la Pologne ne peuvent plus être exclues. Elles sont susceptibles de remettre à l’ordre du jour la course aux armements.
Comment définir, dans ces conditions, la nouvelle ère qui s’annonce ? Fin du monde monopolaire ? Retour à la guerre froide ou du moins à la course aux armements ? Prémices d’un monde multipolaire ? Peut être faudrait-il tout simplement inscrire les guerres de l’ère post-guerre froide dans les effets d’une géopolitique de puissance et des affrontements qu’elle annonce et génère ? Nous pensons plutôt qu'il serait prématuré de conceptualiser les soubresauts de cette conjoncture.

Professeur Khalifa Chater

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Saturday, August 09, 2008

Est-ce que la guerre du Caucase a commencé ?

Fait indéniable, la Russie et la Géorgie sont désormais en guerre. Le déclenchement dans la nuit du jeudi à vendredi, par l'armée géorgienne d'une offensive militaire contre sa région séparatiste pro-russe rebelle d'Ossétie du Sud - a mis le feu aux poudres. L’armée russe a pris fait et cause pour les habitants de l’Ossétie, dont l’allégeance à la Russie est incontestable et rappela pour légitimer son intervention militaire, le vendredi 8 août 2008, que plusieurs d’entre eux disposaient, de passeports russes.

Les discours des protagonistes attestent que la situation reste grave et assez confuse. Le nombre des victimes de la « pacification » géorgienne - 1400 habitants d’Ossétie du Sud, selon le président ossète, Edouard Kokoïty –, les nombreuses victimes des affrontements russo-géorgiennes, l’escalade qui s’en suivit et les risques de l’internationalisation rendent la situation géopolitique bien préoccupante.
Prenons la juste mesure de la gravité de cette nouvelle guerre de l’ère post-guerre froide, inaugurée par la guerre d’Irak et le bouleversement du Moyen-Orient qu’elle a provoqué. A la suite de l’implosion de l’URSS, la Géorgie confirma sa déclaration d’indépendance. Mais elle dut prendre acte de l’affirmation de l’autonomie de certaines de ses composantes : les deux républiques de l’Abkhazie
au nord-ouest, et de l’Adjarie au sud-est, ainsi que la région autonome, de l’Ossétie du Sud, dans le centre-nord du pays. Suite à cette volonté d’intégration nationale et de l’émergence du mouvement séparatiste contestataire, la Géorgie riposta militairement contre les Ossètes (1990 -1992), suite à la déclaration d'indépendance de l'Ossétie du Sud en 1990 et contre les sécessionnistes abkhazes (1992 -1993).Ces conflits s’expliquaient par l’affirmation des ethnies et/ou des nationalités, lors des restructuration des anciens Etats de l’URSS et des velléités de re-équilibrages qu’elles ont mise à l’ordre du jour.

Source : Présentation générale et données démolinguistiques,

proposée par l'Université canadienne de Laval, in www.tlfq.ulaval.ca/axl/Asie/georgie.htm



Fait plus grave, le renversement des alliances de l’ère post-guerre froide et le rapprochement de la Géorgie des Etats-Unis, illustré par l’envoi de troupes en Irak (plus de 2000 soldats), en attendant son entrée annoncée dans l’OTAN, ne pouvaient que susciter les inquiétudes de l’Establishment russe, qui redoute les effets du re-alignement de ses anciens alliés, qui sont de surcroît dans son aire de proximité et de sa profondeur géostratégique. Faut-il négliger, comme dessous des cartes, la question pétrolière ? La Géorgie est, en effet, traversée par l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan, construit pour acheminer vers l'Europe les hydrocarbures de la Caspienne en échappant au contrôle de la Russie. Elle est, désormais,
un Etat de transit pour le gaz et le pétrole ?
Comment interpréter les affrontements de Géorgie ? Est-ce
que la Russie veut affirmer qu’elle n’est plus disposée à se laisser faire et qu’elle veut surveiller son aire de voisinage, ou du moins y affirmer sa présence ? Sommes-nous les témoins d’une nouvelle politique russe, qui tout en ménager la puissance monopolaire, tient à faire échec à tout engagement déclaré en sa faveur ? Est-ce que cette politique russe est en mesure de calmer les élans de ses anciens alliés, pour empêcher leur re-alignement contre elle ? La suite des événements permettra de clarifier la situation, en relation avec les rapports de forces et les marges de manoeuvre respectives des différents acteurs sur la scène internationale. Wait and see.

Professeur Khalifa Chater

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Tuesday, August 05, 2008

Quel scénario de sortie de crise en Palestine ?

La sécession de Gaza et la guerre civile entre Fath et Hamas qu’elle a mis à l’ordre du jour ne sont pas de nature à servir la cause palestinienne. Point d’unité de vue entre les deux mouvements sur la stratégie de libération, la négociation du processus de paix et, bien au-delà, du projet de société de l’Etat à édifier. La conduite des négociations par la Présidence, dans un contexte bien défavorable - vu la volonté de leur vis-à-vis de gagner du temps, de poursuivre la colonisation et la « pacification », pour imposer le fait accompli - ne pouvait que subir les contrecoups de cette division. L’affrontement du samedi 2 août 2008 - l’encerclement du faubourg de Chédjaïa, son encerclement par des hommes du Hamas et les combats meurtriers qui s’en suivit - illustrent cette montée des périls. Des membres du Fatah, - le chef du clan, Ahmed Helles, ainsi que 179 de ses hommes - furent contraints de se réfugier auprès des troupes d’occupation, qui ne manquèrent pas l’occasion de les humilier. Cet état révèle la dégradation de la situation et la dérive de la résistance, qui fait valoir les intérêts fractionnels sur la cause nationale.

Quels scénarios de sortie de crise ? El-wifak el-Arabi a tenté, dans une étude pertinente intitulée «Palestine, les choix difficiles» (août 2008) d’identifier les différents scénarios possibles :

1- Le statu quo permettant de maintenir les deux pouvoirs, celui d’Abou Mazen, en Cisjordanie et du Hamas à Gaza, au profit de l’establishment israélien qui saisirait cette opportunité pour occulter le traitement des questions essentielles de Jérusalem, des réfugiés et des frontières.

2- La perte du pouvoir de l’autorité palestinienne et sa délégitimation. Ce qui permet à l’Etat israélien de maintenir son occupation. Il profiterait, de telles circonstances, pour assurer l’expansion de sa colonisation, sous des prétextes sécuritaires. Gaza serait, dans ce cas, un canton autonome ou d’apparence autonome.

3 - Possibilité de faire valoir une volonté ferme et réelle pour mettre fin à la division et à la partition territoriale. Ce qui permet de créer un ordre palestinien nouveau, sur des bases nouvelles. Les Palestiniens devraient payer le prix de leur réunification, accepter des sacrifices et effectuer des révisions déchirantes.

Reconnaissons, cependant que les conditions de la reconstruction nationale ne sont pas réunies. Qu’il nous suffit de signaler l’incompatibilité entre les discours des acteurs, leurs choix stratégiques prioritaires dans leurs dosages respectifs entre la résistance et la négociation. Notons, d’autre part, que dans le cas palestinien, l’impact de l’environnement régional est très important. La démarcation entre les deux axes arabes (radicaux et modérés) conforte la division palestinienne, par les alliances différentielles entre les deux mouvances qu’elles entretiennent. Frappant le Hamas d’ostracisme, Israël, les USA et dans une moindre mesure l’Union Européenne, culpabilisent toute volonté de dialogue des autorités palestiniennes avec le Hamas. Or, toute négociation suppose de traiter avec tous les acteurs sur le terrain. De son côté le Hamas diabolise tous ceux qui engagent des pourparlers, ne fut-ce dans le cadre de l’initiative arabe de paix, formulée lors du Sommet de Beyrouth et confirmée dans leurs différentes instances.

A ce propos, ne devrait-on pas encourager la construction d’un dialogue palestinien, sur cette initiative de paix, qui bénéficie d’un large consensus arabe ? Ne faut-il pas faire valoir sur cette base, un compromis, mettant à l’ordre du jour la négociation, sans exclure les moyens de résistance, qui ont constitué des facteurs de dissuasion dans la lutte, lors de la décolonisation ? Une telle stratégie pourrait être cautionnée par l’engagement arabe en faveur de la reconstruction de l’unité et confortée par solidarité arabe contre la normalisation, hors du processus de paix.

La politique progressive peut donner des résultats, mais dans la mesure où le vis-à-vis prend des engagements et assure leur application. Nous en sommes pas là hélas. Ce qui nécessite de revoir la donne, de corriger les tactiques et d’opter pour une stratégie réaliste et lucide, bien adaptée au contexte du refus et de l’impuissance internationale.

Professeur Khalifa Chater

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Tuesday, July 29, 2008

Il faut réhabiliter les acteurs du sud

« Processus de Barcelone : l’Union pour la Méditerranée », projet d’avenir ou projet mort-né ?

Avis du Professeur Khalifa Chater


Question : De quelle manière est perçu, dans votre pays, le projet « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée », à la fois par l’opinion publique et par les autorités officielles ?

Réponse : L’opinion publique et les autorités ont bien accueilli le projet. On souhaite que ce projet réponde aux enjeux et aux défis de l’aire par la constitution d’une communauté fondée sur la paix, la solidarité et la prospérité. Une participation active aux instances préparatoires et à la réunion du 13 juillet permettrait, je l’espère, l’appropriation collective du projet et son enrichissement, par la prise en compte des priorités des pays sud-méditerranéens. Il s’agit de construire le compromis fondateur, condition sine qua none de sa réussite.

Pour la jeunesse tunisienne, la réalisation d’un tel partenariat et l’ouverture de l’horizon qu’il implique, semblent répondre aux attentes. Rêve ou utopie, elle met en avant la nécessité de la libre circulation des personnes et la suppression du mur méditerranéen.

Question : Considérez-vous que ce projet est en mesure, véritablement, d’apporter du nouveau à la problématique et aux méthodes envisagées lors des initiatives similaires précédentes, notamment le processus de Barcelone ?

Réponse : Le projet se fonde sur une appréciation lucide des résultats modestes du processus de Barcelone, de l’abandon de son approche multilatérale dans «la politique de voisinage » et de l’occultation des dimensions socio-économiques, géopolitiques et culturelles du partenariat. Ce diagnostique originel, qui réhabilite les partenaires du sud et évoque, en conséquence, une redynamisation des processus de solidarité, a suscité de l’intérêt et de l’enthousiasme. La définition collective des enjeux et des objectifs au cours d’un sommet fondateur, - un postulat faisant valoir la multipolarité - doit prendre en compte les exigences citoyennes de tous. Espérons cependant que les concessions de la genèse : recherche coûte que coûte du compromis, élargissement du périmètre, exclusion des questions d’actualité, ne réduisent pas les enjeux et les ambitions de ce projet historique. Sachons garantir cette mue du rêve en réalité, fut-elle le résultat d’un processus progressif.

Question : L’Union pour la Méditerranée sera, fatalement, confrontée aux conflits qui essaiment dans la région, conflit du Sahara Occidental, conflit de Chypre, conflit israélo-palestinien. L’Union doit-elle aborder ces conflits ou, plutôt, les contourner ?

Réponse : On ne peut occulter la donne politique dans un projet de cette envergure. Comment créer une communauté de prospérité, de coopération et de solidarité, sans assurer un climat de paix ? Il faudrait peut être inaugurer la mise sur pied de ce processus par la création, dans le cadre de ce partenariat, d’un comité ad hoc pour faire valoir des solutions aux conflits et différends, traiter les questions graves de l’aire telles que la question palestinienne. Faut-il négliger cette conditionnalité de la réussite.

Question : Quels sont les chantiers majeurs que peut ouvrir le projet « l’Union pour la Méditerranée »? Quelles mesures de sauvegarde envisager pour que s’assurer que la démarche profite équitablement à toutes les parties au projet ?

Réponse: L’élargissement du projet - il rassemblerait désormais 44 pays riverains de la Méditerranée et de l'Adriatique -, peut assurer, la réussite du processus. Il permettrait à l’Union Européenne de le doter d’importants financements communautaires, tout en sauvegardant sa direction paritaire Nord/Sud. Notons cependant que l’Union Européenne fait défection, en matière de financement. "Les projets régionaux ne peuvent être mis en œuvre au détriment de nos budgets existants", a insisté la commissaire de l’UE, souhaitant privilégier le recours à des fonds privés, des fonds d'Etats, membres ou non de l'Union, ou encore aux institutions financières internationales. Les partisans d’un plan Marshal européen, dans le cadre d’une solidarité communautaire ne peuvent qu’être déçus.

D’autre part, la formulation des projets phares de l’UPM, par l’U.E. : Autoroute du Maghreb, dépollution de la Méditerranée, développement de l'énergie solaire, coopération en matière de protection civile contre les catastrophes montre l’intérêt qu’elle porte au projet. Mais n’aurait-il pas fallu associer les pays sud-méditerranéens à la formulation des projets prioritaires. Notons d’autre part, que ces projets n’ont pas l’ambition de participer au traitement de la question préoccupante de l’emploi, à la fracture socio-économique méditerranéenne, à l’échange inégal et qu’ils occultent toute politique de co-développement.

Question : Dans le même esprit, quelles sont les conditions à réunir pour garantir une équité parfaite dans la gestion institutionnelle de « l’Union pour la Méditerranée » ?

Réponse : La définition des projets génériques de l’UPM et la velléité de remise en cause du siège dans un pays du Sud, par l’installation parallèle d’un "comité de direction", basé à Bruxelles, attestent une volonté de l’U.E. de sauvegarder sa prédominance dans les mécanismes de prise de décision et de gestion.

Il faut tirer les enseignements de l’expérience de Barcelone, réhabiliter les acteurs du Sud, faire valoir les normes d’une collégialité réelle, pour assurer les conditions de réussite du compromis fondateur de l’Union pour la Méditerranée. Ne serait-il pas plus conforme à l’esprit de ce partenariat nouveau, de présenter les vues de l’U. E. comme des propositions et non des décisions et reformuler les termes de références en tenant compte des attentes des pays sud-méditerranéens. A plus ou moins longs termes, il faudrait réaliser la mutation progressive de l’UPM d’une union de projets à un projet d’union.

(Dossier réalisé par Mohamed ChaPublier le messagefik Mesbah

Voir Le Soir d’Algérie, 13, 14, 15 juillet 2008)

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